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Renforcement de la lutte anti-contrefaçon : réunion de travail sur les récentes propositions de la Commission européenne

Le 18 janvier, j’ai présidé une réunion de travail sur les propositions de la Commission européenne visant à lutter plus efficacement contre les atteintes aux droits de propriété intellectuelle.

Ces propositions figurent, d’une part, dans le plan d’action en faveur de la propriété intellectuelle et, d’autre part, dans la nouvelle législation sur les services numériques.

Elles ont été présentées par Angélique Monneraye, qui est chargée de la lutte contre la contrefaçon à la direction générale du marché intérieur, de l’industrie, de l’entrepreneuriat et des PME de la Commission européenne.

Cette réunion a aussi été l’occasion de faire le point sur le protocole d’accord sur la vente de contrefaçons sur Internet (signé en 2011) ainsi que sur le protocole d’accord sur la publicité en ligne et les droits de propriété intellectuelle (signé en 2018).

Vous pouvez lire la présentation de Mme Monneraye en cliquant ici.

Par ailleurs, vous trouverez, ci-dessous, une présentation synthétique de la proposition de règlement sur les services numériques.

Présenté le 15 décembre dernier, ce texte vise notamment à renforcer et clarifier davantage les conditions d’exemption de responsabilité des intermédiaires en ligne (« les plateformes et les autres intermédiaires ne sont pas responsables du comportement illicite d’utilisateurs, sauf s’ils ont connaissance d’actes illicites et ne les empêchent pas »).

Pour ce qui concerne la protection des personnes contre les marchandises dangereuses ou contrefaisantes, les plateformes devront :

  • mettre en place des procédures obligatoires pour la suppression des biens illicites ;
  • assurer la traçabilité des professionnels utilisant leurs services (« connaissance de la clientèle ») ;
  • organiser leurs interfaces en ligne de manière à permettre aux professionnels de respecter leurs obligations d’information à l’égard des consommateurs.

Un nouveau système de signaleurs de confiance sera également disponible, par exemple pour les propriétaires de marques luttant contre la contrefaçon ou pour un signalement et un retrait plus rapides et plus faciles des produits contrefaisants.

Les pouvoirs publics disposeront de nouveaux outils permettant d’ordonner directement le retrait des produits dangereux.

Quant aux très grandes plateformes en ligne, elles feront l’objet d’un audit en matière d’évaluation des risques qui inclura une analyse de leur vulnérabilité à l’égard des biens illicites sur leurs plateformes et leurs mesures d’atténuation au niveau organisationnel seront également soumises à des audits annuels.

Le nombre de contrefaçons saisies aux frontières extérieures de l’UE a augmenté de 53% en 2019

Le 17 décembre dernier, la Commission européenne a publié son rapport annuel sur le contrôle, par les autorités douanières de l’UE, du respect des droits de propriété intellectuelle.

En 2019, les autorités douanières européennes ont intercepté près de 41 millions d’articles contrefaisants, soit une augmentation de 53% par rapport à l’année précédente. La valeur des articles saisis a quant à elle augmenté de 3% (759,2 millions d’euros, contre 738,1 millions d’euros en 2018).

En France, 1,6 million d’articles de contrefaçon ont été retenus par les douanes, soit une baisse de 21% par rapport à 2018.

Les cigarettes figurent toujours en tête des articles saisis (21,3%). Viennent ensuite les matériaux d’emballage (13,6%), les allumettes (20%), les jouets (9,6%) et les vêtements (3,9%).

Sans surprise, la Chine demeure le principal pays d’origine des contrefaçons (33% des articles saisis). Elle est suivie par le Pakistan (27,2%), la Moldavie (12,9%), la Bulgarie (10%), la Turquie (6,5%), la Chine et Hong Kong (4,1%) et le Liban (1,7%).

La Turquie est le principal pays d’origine des faux produits alimentaires et des faux briquets. Le Guatemala arrive en tête pour les contrefaçons de boissons alcoolisées. Les fausses boissons non alcoolisées proviennent principalement de Sainte Lucie. La Chine figure en haut de la liste pour les contrefaçons de parfums et de cosmétiques, de vêtements et d’accessoires, de chaussures, de sacs, de bijoux, d’appareils audio/vidéo, de cartouches d’encre et de toners, de matériel informatique, de jouets, de machines et d’outils, de véhicules, de papeterie de bureau et de textiles. La Région administrative spéciale de Hong Kong est, elle, toujours en tête pour les contrefaçons de montres, de téléphones portables et d’accessoires, d’étiquettes et d’autocollants. Pour ce qui concerne les faux CD/DVD, le Bangladesh occupe la première place, devant Hong Kong. Singapour, l’Inde et la Chine sont les trois premiers fournisseurs de faux produits médicaux. Les fausses cigarettes proviennent majoritairement de Bulgarie. Quant à la Moldavie, elle est le principal pays d’origine des matériaux d’emballage contrefaisants.

85% de l’ensemble des articles retenus par les douanes ont transité par fret postal ou fret express.

Par ailleurs, dans 75% des cas, les marchandises ont été détruites ou une procédure judiciaire a été engagée pour caractériser l’infraction ou mener à bien une procédure pénale.

Vous pouvez consulter le rapport de la Commission en cliquant ici.

Un rapport relatif aux retenues au sein du marché intérieur de l’UE a également été publié le 17 décembre. Il s’agit d’un document réalisé par l’Observatoire européen des atteintes aux droits de propriété intellectuelle. Vous pouvez le lire en cliquant ici.

Contrefaçon et piratage : la Commission européenne a actualisé la liste des marchés sous surveillance

Le 14 décembre, la Commission européenne a actualisé la liste de surveillance de la contrefaçon et du piratage, sur la base des résultats d’une consultation publique réalisée au cours du premier semestre 2020.

Publiée en 2018, cette liste, non exhaustive, s’inspire de celle tenue par le Bureau du représentant américain au commerce (Notorious Markets List). Elle répertorie les marchés en ligne et les marchés physiques situés en dehors de l’UE dont il a été signalé qu’ils commettent ou facilitent d’importantes atteintes aux droits de propriété intellectuelle, aux dépens des consommateurs de l’UE.

L’objectif poursuivi par l’exécutif européen est double :

  • encourager les opérateurs des marchés, les autorités locales de contrôle et les gouvernements à prendre des mesures pour lutter contre les atteintes à la propriété intellectuelle ;
  • sensibiliser les citoyens de l’UE aux risques liés à l’environnement, à la sécurité des produits et à d’autres risques liés aux achats sur des marchés problématiques.

Les marchés sous surveillance sont répartis en quatre catégories :

  • les sites internet proposant des contenus protégés par le droit d’auteur ;
  • les plateformes de commerce électronique ;
  • les pharmacies en ligne ;
  • les marchés physiques.

La liste doit être actualisée tous les deux ans.

Vous pouvez en prendre connaissance en cliquant ici.

Brevets : la France sur le podium européen de la nouvelle révolution industrielle

Selon l’étude de l’Office européen des brevets sur les évolutions technologiques mondiales, la France se place en Europe derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni, en se distinguant notamment ans la sécurité, la protection des données et les systèmes 3D.

Les petits Français sont peut-être nuls en maths, si l’on en croit la dernière étude internationale TIMMS , mais nos chercheurs et nos ingénieurs demeurent parmi les plus performants au monde. Selon la nouvelle étude publiée jeudi par l’Office européen des brevets, l’OEB, la France se place en effet sur la troisième marche du podium des pays les plus innovants en Europe dans ce qu’il est convenu d’appeler la quatrième révolution industrielle, la 4RI. En clair, celle qui englobe les technologies liées aux objets connectés intelligents, les big data, l’intelligence artificielle et la 5G.

Forte hausse des demandes de brevets

Dans cette étude, intitulée « Brevets et quatrième révolution industrielle : les évolutions technologiques mondiales à l’origine de l’économie des données », l’OEB a examiné toutes les familles de brevets internationales (FBI) relatives aux technologies de la 4RI entre 2000 et 2018. Nul ne s’étonnera d’y découvrir que l’innovation dans ces technologies s’est considérablement accélérée dans le monde entier au cours de la dernière décennie. Entre 2010 et 2018, les demandes de brevet ont ainsi augmenté, en moyenne, « de près de 20 % par an, soit près de cinq fois plus vite que la moyenne de tous les autres domaines technologiques », révèle l’étude.

En revanche, la place de la France, à l’origine de 12,5 % de toutes les FBI européennes en la matière sur la période 2000-2018, sur le podium des pays européens les plus innovants dans la 4RI, juste derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni, pourra en étonner plus d’un. Une performance que tempère l’Office européen des brevets en relevant que si, sur cette période, les FBI françaises ont augmenté de 11,9 % par an en moyenne, cette croissance est « cependant moins dynamique que celle de l’Europe dans son ensemble (15,5 %), ou que la croissance observée au niveau mondial (19,7 %). »

La France se distingue

L’OEB note toutefois que « l’Hexagone se distingue dans les technologies habilitantes (sécurité, protection des données et systèmes 3D) ainsi que dans le domaine des applications (infrastructures intelligentes, véhicules intelligents et maisons intelligentes) ». Le pays place ainsi plusieurs entreprises dans le top 100 mondial : Technicolor (48e), Orange (60e), Thales (89e) et Valeo (96e), précise l’étude. Ce dynamisme français est porté, souligne l’Office, « par une place forte de l’innovation, Paris, qui se hisse à la 5e place des pôles d’innovation 4RI en Europe, et se distingue dans les domaines de la sécurité des données, de la sûreté, des véhicules et des infrastructures. »

Sur le plan mondial, les États-Unis arrivent en tête de l’innovation liée à la 4RI, concentrant environ un tiers de toutes les FBI, avec une croissance moyenne annuelle de 18,5 % depuis 2010. L’Europe et le Japon rassemblent environ un cinquième de toutes les FBI (15,5 % et 15,8 % de croissance). La Corée du Sud et la Chine ont gagné du terrain, avec une croissance annuelle très rapide depuis 2010, de 25,2 % et 39,3 % respectivement en moyenne.

Antoine Boudet
Les Échos (10/12/20)

Usurpation de la dénomination « cuir » : réponse du Gouvernement à ma question écrite

Le 29 octobre dernier, j’ai attiré l’attention du Gouvernement sur l’usurpation de la dénomination « cuir »

Vous trouverez, ci-dessous, le texte de ma question écrite ainsi que la réponse du ministre de l’économie, des finances et de la relance.

Question n° 18466 adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance (publiée au JORF le 29/10/20)

M. Richard Yung attire l’attention de M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance sur l’usurpation de la dénomination « cuir ». Il lui rappelle que le décret n° 2010-29 du 8 janvier 2010 interdit l’utilisation du mot « cuir » pour désigner « toute autre matière que celle obtenue de la peau animale au moyen d’un tannage ou d’une imprégnation conservant la forme naturelle des fibres de la peau ». Il note que, faute d’harmonisation européenne, cette interdiction ne s’applique pas aux produits fabriqués à partir de matières autres que le cuir (fibres de fruits ou de légumes, matières synthétiques) qui ont été préalablement mis à disposition sur le marché dans les États membres dépourvus de règles encadrant la dénomination « cuir », et cela en raison du principe de libre circulation des marchandises au sein du marché de l’Union. Il note également que des dénominations susceptibles d’induire en erreur les consommateurs sont régulièrement utilisées pour désigner des produits ressemblant à des produits en cuir (« cuir d’ananas », « cuir de champignon », « cuir végan », etc.). Au regard de ce constat, qui souligne la nécessité d’assurer une concurrence loyale entre opérateurs économiques et de permettre aux consommateurs d’effectuer un choix éclairé, il lui demande si la France continue de plaider auprès de la Commission européenne pour l’adoption d’un règlement européen s’inspirant de celui relatif aux dénominations des fibres textiles.

Réponse de M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance (publiée au JORF le 10/12/20)

Les autorités françaises sont pleinement conscientes des difficultés rencontrées par la filière du cuir résultant de l’absence d’une définition harmonisée de la dénomination « cuir » au sein de l’Union européenne. Cette situation ne permet ni de garantir des conditions de concurrence loyale pour l’industrie européenne du cuir, ni de protéger de manière totalement satisfaisante les intérêts des consommateurs européens en leur assurant une information homogène et appropriée. Les autorités françaises plaident en conséquence, chaque fois qu’elles en ont l’occasion, pour une telle harmonisation européenne en la matière. Au plan national, le décret n° 2010-29 du 8 janvier 2010 interdit de fait l’utilisation du mot « cuir » pour désigner toute autre matière que celle obtenue de la peau animale au moyen d’un tannage ou d’une imprégnation conservant la forme naturelle des fibres de la peau. Ce texte a toutefois uniquement une portée nationale ; il ne s’applique ainsi pas aux produits légalement fabriqués dans un autre État de l’Union européenne ou importés via un de ces États, conformément aux principes de libre circulation des marchandises et de reconnaissance mutuelle. Pour ce qui concerne les dénominations susceptibles d’induire en erreur les consommateurs pour désigner des produits ressemblant à des produits en cuir, une nuance doit cependant être apportée entre, d’une part, le respect formel du décret national précité et, d’autre part, le respect de l’exigence de portée plus générale de ne pas induire le consommateur en erreur sur la nature ou les qualités substantielles de toute marchandise. Ces dernières pratiques, relevant de la pratique commerciale trompeuse (définie par l’article L. 121-2 du code de la consommation), constituent un délit pouvant être recherché et constaté par les agents de la DGCCRF quel que soit le lieu de fabrication ou d’importation des articles en cause. Dans les enquêtes, régulièrement conduites par la DGCCRF dans le domaine du cuir et des produits en cuir, l’absence même d’une réglementation européenne harmonisée ne prive donc pas les enquêteurs de toute possibilité d’action s’ils constatent l’usage de présentations commerciales manifestement trompeuses.

Évaluation de la lutte contre la contrefaçon : les députés Blanchet et Bournazel ont présenté leur rapport d’information

Le 9 décembre, les députés Christophe Blanchet (Calvados) et Pierre-Yves Bournazel (Paris) ont présenté leur rapport d’information sur l’évaluation de la lutte contre la contrefaçon.

Ce document est le fruit des travaux qu’ils ont conduits dans le cadre du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC).

Pour mener ces travaux d’évaluation, les rapporteurs ont sollicité l’assistance de la Cour des comptes, qui leur a remis un rapport s’inscrivant dans le prolongement de celui que les magistrats de la rue Cambon avaient publié en 2014.

Le rapport du CEC comprend dix-huit propositions. Nombre d’entre elles rejoignent celles formulées par le CNAC, ce dont je me réjouis. Je forme le vœu qu’elles puissent rapidement trouver une traduction législative et/ou réglementaire. Il y va de la protection des consommateurs et de la défense de l’innovation.

Proposition n°1 : Autoriser les Douanes à pratiquer des coups d’achat pour les médicaments et les matières premières à usage pharmaceutique.

Proposition n°2 : Inciter les maires à se saisir de l’expérimentation relative à la verbalisation de la vente à la sauvette par la police municipale et construire une collaboration plus étroite avec les services de la police nationale.

Proposition n°3 : Informer les consommateurs sur l’impact négatif des contrefaçons à différents moments clés de l’éducation ou de la vie économique : école, collège, lycée, service national universel, achats sur des sites internet ou des réseaux sociaux.

Proposition n°4 : Adopter une stratégie nationale et un plan d’action de lutte contre la contrefaçon, et charger un délégué interministériel d’assurer sa mise en œuvre.

Proposition n°5 : Charger l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) de collecter l’ensemble des données utiles à la quantification de la contrefaçon et au recensement de l’action des administrations.

Proposition n°6 : Instituer une procédure administrative d’avertissement ou de blocage des sites internet proposant à la vente des produits contrefaisants.

Proposition n°7 : Instituer des agents assermentés pour le droit des marques autorisés à constater une infraction commise sur internet et à exiger, pour le compte du titulaire de droits, qu’il soit mis fin à l’exposition et à la vente de contrefaçon sur des plateformes commerciales ou des réseaux sociaux.

Proposition n°8 : Renforcer l’efficience du blocage des sites commercialisant des contrefaçons :

  • introduire dans le code de la propriété intellectuelle une disposition permettant à l’autorité judiciaire de prononcer la suspension groupée de nombreux noms de domaine et de comptes de réseaux sociaux, et le regroupement des plaintes contre les sites les plus actifs ;
  • prévoir un texte d’application a) précisant que le plaignant n’aura pas besoin de démontrer un lien ou une connexité entre les différents sites dont le blocage est demandé, considérant qu’ils sont liés de fait par l’atteinte commune qu’ils portent à la marque ; b) réduisant le formalisme de la preuve pour admettre les copies d’écran et attestations d’un agent assermenté en droit des marques ; c) autorisant l’injonction par le juge de retrait de contenus identiques ou équivalents à un contenu qui a déjà fait l’objet d’un constat d’illicéité ;
  • prévoir une disposition précisant expressément qu’en cas d’impossibilité de connaître le responsable du site, l’injonction s’adresse au prestataire de service intermédiaire ;
  • prévoir les modalités d’un transfert de la propriété du nom de domaine suspendu au titulaire de droits afin d’en empêcher la reconstitution ;
  • instituer une obligation d’avertissement du consommateur sur la page du site suspendu pour contrefaçon ou vente illégale mentionnant la condamnation intervenue.

Proposition n°9 : Évaluer les décisions rendues par les tribunaux en matière de contrefaçon en s’intéressant particulièrement à l’analyse des dommages-intérêts et aux condamnations aux dépens.

Proposition n°10 : Instituer dans le code de la propriété intellectuelle une amende civile à l’encontre du vendeur de contrefaçon, proportionnée à la gravité de la faute commise, aux facultés contributives de l’auteur du délit et aux profits qu’il en aura retirés.

Proposition n°11 : Faciliter la défense des droits de propriété intellectuelle des entreprises :

  • créer un organisme sous la forme juridique d’un groupement d’intérêt public (GIP) ou d’une association pour conseiller et apporter une aide aux titulaires de droits, en particulier les PME ;
  • autoriser à se pourvoir en justice une association existante ou à créer spécifiquement à cet effet, sur le modèle de l’association de lutte contre la piraterie audiovisuelle (ALPA) ;
  • étudier l’extension de l’action de groupe au domaine de la contrefaçon.

Proposition n°12 : Mieux lutter contre les ventes illicites de tabac :

  • appliquer l’article 29 de la loi n°2018-898 relative à la lutte contre la fraude qui oblige les réseaux sociaux à énoncer que la vente de tabac est illégale ;
  • dresser le bilan de l’amende forfaitaire sanctionnant l’achat à la sauvette de tabac et étudier la possibilité de sanctionner la détention de tabac illicite comme celle de stupéfiants ;
  • sensibiliser les réseaux sociaux à leur obligation de retirer les annonces illégales sans intervention du titulaire de droits, de la même manière qu’ils coopèrent pour supprimer les contenus haineux.

Proposition n°13 : Adapter l’organisation judiciaire aux mutations du commerce international en ligne :

  • dédier une chambre juridictionnelle dans certains gros tribunaux judiciaires aux litiges relatifs au commerce en ligne ;
  • permettre aux détenteurs de droits de déposer leurs requêtes en ligne ;
  • limiter la rotation des magistrats dans les postes spécialisés dans la propriété intellectuelle et les litiges relatifs au commerce en ligne.

Proposition n°14 : Intégrer la contrefaçon dans la feuille de route politique de l’Union européenne, prioriser la lutte contre la contrefaçon au sein des missions de l’Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) et d’Europol.

Proposition n°15 : Reconnaître la responsabilité des plateformes de commerce électronique et des réseaux sociaux en cas de mise en vente de produits contrefaisants et leur imposer un devoir de vigilance, reposant notamment sur :

  • une obligation de retirer dans un délai maximal la marchandise du site après réception d’une notification motivée de la part d’un titulaire de droits ;
  • une obligation de transparence sur les moyens mis en œuvre pour lutter contre la vente de contrefaçon ;
  • une obligation de coopérer avec leurs autorités administratives pour les demandes d’information ;
  • une obligation d’exiger l’identité des vendeurs professionnels ;
  • une obligation de remboursement du client trompé sur la qualité de la marchandise ;
  • une obligation d’information des consommateurs lorsqu’ils ont été exposés à des produits de contrefaçon.

Proposition n°16 : Faire figurer la protection des droits de la propriété intellectuelle dans tous les accords commerciaux bilatéraux signés par l’Union européenne.

Proposition n°17 : Réglementer plus efficacement la vente en ligne de médicaments :

  • renforcer les obligations des registraires de noms de domaine en ce qui concerne les sites de vente de médicaments ;
  • imposer aux plateformes de commerce électronique des mesures proactives pour retirer les médicaments falsifiés en vente ;
  • prévoir pour les réseaux sociaux une obligation de mettre en place des filtres dès lors qu’il s’agit d’offres ou incitations à vendre des médicaments.

Proposition n°18 : Prévoir des publications périodiques sur les falsifications de médicaments au sein de l’Union européenne.

Vous pouvez lire le rapport d’information en cliquant ici.

Ici, c’est le temple de la contrefaçon

Insécurité, occupation de l’espace public, nuisances… les trafics gangrènent les quartiers de Barbès et Château-Rouge. Le député Pierre-Yves Bournazel remet aujourd’hui un rapport à l’Assemblée.

Le Parisien, par Cécile Beaulieu, 9 décembre 2020

AUX CONFINS de la Goutte d’Or et du boulevard de la Chapelle, les quartiers de Château- Rouge et de Barbès, à Paris (XVIIIe), constituent un marché de la contrefaçon à ciel ouvert que jamais personne, au fil des dernières décennies, n’a mis à mal. Le député de la circonscription, Pierre- Yves Bournazel (Agir), travaille depuis deux ans sur cette problématique avec un élu normand.

Il remet aujourd’hui un rapport accablant à l’Assemblée nationale (lire ci-dessous).

L’intégration du quartier, dès 2012, à la première zone de sécurité prioritaire (ZSP) parisienne, avec les effectifs et dispositifs qui y sont liés, n’a pas bouleversé la donne. La police — les brigades « antisauvettes » — arpente pourtant quotidiennement le secteur, où l’on dresse entre 90 et 120 procès-verbaux chaque jour… même si le problème est essentiellement traité sous l’angle de l’occupation illégale de l’espace public. C’est également là que les riverains, exaspérés, ont obtenu la condamnation de la Ville et de l’État pour défaut de moyens dans le maintien de l’ordre public. En vain.

Les clients viennent de toute l’Ile-de-France et même de l’étranger
À Château-Rouge, dans le triangle délimité par les rues Dejean, Poulet et des Poissonniers, on trouve presque tous les produits en version contrefaite : maroquinerie, lunettes, produits de beauté, médicaments… La clientèle, dense, vient de toute l’Ile-de-France, et même de bien au-delà.

« Les policiers ont rencontré des clients venus des Pays- Bas pour trouver LE produit qu’ils voulaient », soulignent les députés dans leur rapport d’information.

Ces sacs à main estampillés de grandes marques, sous blister, ceintures, parfums, produits de beauté installés sur de petits stands de fortune sont retirés en quelques minutes dès que la police est signalée.

« Et maintenant, les chaussures contrefaites ont fait leur apparition. C’est la nouveauté ! », ironise une habitante du quartier.

Les lots contrefaits sont entreposés à Aubervilliers (Seine- Saint-Denis) puis répartis dans des caves et des box du quartier avant d’être proposés à la vente dans la rue par petites quantités. « Les vendeurs, eux, derniers maillons de la chaîne, viennent chaque jour de proche banlieue, ajoute cette habitante. J’ai moi-même pris le bus 31 en provenance de la gare du Nord avec une vendeuse de contrefaçons, que j’ai vue s’installer à Château- Rouge. C’est sans fin ! Il faudrait frapper les réseaux, saisir les stocks. D’ailleurs, l’été dernier, la police a découvert une cache où étaient entreposés des sacs à main… Et nous n’en avons plus vu à la vente dans la rue pendant des mois. Cela n’arrive pas assez souvent. »

Des montagnes de déchets
Le trafic crée des nuisances devenues insupportables pour les riverains. Chaque jour, vendeurs à la sauvette et commerçants peu scrupuleux génèrent des montagnes de déchets.

Quelques centaines de mètres plus loin, aux abords de la station de métro Barbès, des dizaines d’hommes battent le pavé, haranguant le client.

Leur business ? Les cigarettes de contrebande, mais aussi de contrefaçon, de plus en plus nombreuses (lire ci-dessous).

« Non contents de nous faire vivre au milieu du trafic, ils sont agressifs, dangereux, s’agace un riverain. Les gens baissent le regard de peur de prendre un mauvais coup. »  

De plus en plus de cigarettes

APRÈS LA CONTREBANDE, voici les cigarettes de contrefaçon.

Le commissariat du XVIIIe arrondissement, qui compte les « spots » de Barbès et de la place de la Chapelle, a observé depuis quelque temps l’apparition de paquets de contrefaçon.

A l’origine du phénomène, l’installation d’usines clandestines équipées à partir du matériel d’entreprises en faillite, qui se procurent du tabac dans des pays comme la Pologne ou la Bulgarie, où sa culture est peu réglementée et abondante. Le trafic est essentiellement aux mains de groupes criminels originaires d’Europe de l’Est, notamment d’Ukraine. La décision de porter progressivement le prix du paquet de cigarettes à 10 € a créé un appel d’air pour les trafiquants, qui les revendent à moitié prix sur les trottoirs ou la Toile.

La préfecture de police, citée dans le rapport de Pierre- Yves Bournazel et Christophe Blanchet, souligne que « les juges peinent à comprendre la nuisance que représente la vente illégale de cinq à dix paquets de cigarettes sur la voie publique ». Seul un PV est dressé, la marchandise saisie.

Les vendeurs, eux, s’en tirent avec un rappel à la loi. C.B.

Dix-huit propositions pour combattre ce fléau

C’est le quartier Château- Rouge (Paris XVIIIe), haut lieu de la vente de produits contrefaits, qui a posé les premières pierres de l’épais rapport d’information présenté cet après-midi à l’Assemblée nationale. Ses auteurs, Pierre-Yves Bournazel, député (Agir) de la circonscription et élu dans le XVIIIe arrondissement, et Christophe Blanchet, député (MoDem) de la 4e circonscription du Calvados, y dressent un état des lieux de la contrefaçon à l’issue d’un travail de deux ans, au cours desquels des dizaines d’auditions ont été menées auprès d’acteurs du luxe, des policiers, services de douanes, magistrats, associations, assorties de tables rondes et de visites sur le terrain, à Château-Rouge, au Havre et à Roissy.

Cibler les sites touristiques
Les rapporteurs déclinent 18 propositions visant à mieux coordonner acteurs publics et privés, réviser le cadre législatif et renforcer la réponse judiciaire. Mais aussi protéger les créateurs, fabricants et consommateurs. L’affaire est d’autant plus importante que la contrefaçon est la deuxième économie criminelle après le trafic de stupéfiants ! « La contrefaçon est un fléau qui concerne tous les produits, des jouets non homologués aux parfums, vêtements, maroquinerie, produits de beauté, médicaments, alimentation, cigarettes, détaille Pierre-Yves Bournazel. Ces trafics dans lesquels sont impliqués des ressortissants des pays du Maghreb, d’Europe de l’Est et de Chine, avec des ramifications européennes, nourrissent l’économie criminelle tout en s’attaquant à nos savoir-faire, à l’emploi et à la propriété intellectuelle. Ils représentent également un danger pour la santé publique, dans certains cas, et lorsqu’ils sont vendus sur les trottoirs, troublent l’ordre public et nuisent à la sécurité des habitants. » Sont concernés les quartiers de Barbès, La Chapelle, les portes Montmartre et de Clignancourt (XVIIIe), Belleville (XXe), et les sites touristiques, comme les abords de la tour Eiffel (VIIe) « J’ai constaté, en tant qu’élu et habitant du XVIIIe, la complexité de la situation à Château- Rouge, la saturation de l’espace public et l’impuissance des pouvoirs publics à endiguer un problème devenu endémique », ajoute Pierre-Yves Bournazel.

Bloquer des sites Internet
Opérations des douanes, de la police, des brigades spécialisées : le travail de terrain est là, mais la coordination rarement au rendez-vous. Pour y remédier, les deux députés proposent d’inciter les maires à se saisir de l’expérimentation relative à la verbalisation des ventes à la sauvette par la police municipale, et de construire une collaboration plus étroite avec la police nationale.

Outre le renforcement de la coopération internationale et le renforcement de la politique de prévention auprès des acheteurs, les rapporteurs préconisent la création d’une procédure de blocage des sites Internet proposant des produits contrefaits dont ils pointent le développement exponentiel.

D’introduire, enfin, dans le code de la propriété intellectuelle, une disposition permettant de prononcer la suspension groupée de noms de domaine et de comptes de réseaux sociaux. Les plaintes contre les sites les plus actifs pourraient également être regroupées, comme c’est le cas aux États-Unis ou en Italie.

Après présentation aux députés, le rapport sera remis la semaine prochaine au Premier ministre Jean Castex. C.B.

Lutte contre la contrefaçon: la Commission européenne propose de mettre en place une boîte à outils européenne

Le 25 novembre, la Commission européenne a publié son plan d’action en faveur de la propriété intellectuelle.

Ce document s’inscrit dans le prolongement de la nouvelle stratégie industrielle de l’UE, qui a été adoptée le 10 mars dernier. Il repose sur le constat que les secteurs à forte intensité de droits de propriété intellectuelle « jouent un rôle essentiel dans l’économie de l’UE ». Ces secteurs représentent actuellement près de 45% du PIB de l’UE et contribuent directement à la création de presque 30% de l’ensemble des emplois.

La principale ambition de l’exécutif européen est d’« aider les entreprises à tirer parti de leurs inventions et de leurs créations, tout en veillant à ce que ces dernières soient utiles à l’économie et à la société dans leur ensemble ».

Les États membres sont invités à s’appuyer sur le plan d’action pour « élaborer leurs politiques et stratégies nationales en matière de propriété intellectuelle ». Ils sont en outre encouragés à « faire de l’amélioration de la protection et du respect de la propriété intellectuelle une priorité dans le cadre de leurs propres efforts visant à assurer la reprise économique ».

Pour ce qui concerne la lutte contre les atteintes aux droits de propriété intellectuelle, la Commission juge nécessaire d’« intensifier les efforts », au regard de la progression des importations de contrefaçons et de marchandises pirates dans l’UE (6,8% des importations de l’UE en 2016, contre 5% en 2013).

Outre la clarification et le renforcement de la responsabilité des plateformes en ligne (un train de mesures doit être présenté le 9 décembre), la Commission propose de renforcer les capacités des autorités chargées de faire appliquer la législation. Concrètement, les États membres sont invités à « inclure la criminalité liée à la propriété intellectuelle parmi les priorités du prochain cycle politique de l’UE […] pour la période 2022-2025 ». De plus, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) devrait voir son mandat élargi. Il serait chargé, d’une part, d’empêcher l’entrée de contrefaçons sur le marché unique et, d’autre part, d’agir contre la production de contrefaçons dans l’UE.

La Commission envisage également de soutenir les autorités douanières des États membres en vue d’améliorer les mesures de gestion des risques et de lutte antifraude : mise en place, à l’échelle de l’UE, d’une « couche de capacités d’analyses des données » ; amélioration de la dotation des États membres en équipements de contrôle douanier ; renforcement de la coopération au sein de l’UE et avec les autorités douanières des pays partenaires.

Afin de renforcer la coopération entre tous les acteurs concernés (titulaires de droits, plateformes en ligne, services de paiement, etc.), la Commission a prévu de mettre en place une boîte à outils européenne de lutte contre la contrefaçon (partage de données pertinentes sur les produits et les commerçants ; utilisation de nouvelles technologies telles que la reconnaissance d’images, l’intelligence artificielle et la chaîne de blocs).

La Commission souhaite par ailleurs encourager les « campagnes visant à lutter contre l’entrée sur le marché des contrefaçons les plus préjudiciables pour les consommateurs ».

S’agissant du vol informatique de secrets d’affaires (60 milliards d’euros de pertes dans l’UE), la Commission souhaite promouvoir la sensibilisation à la cybersécurité ainsi que la gestion experte de la propriété intellectuelle (élaboration d’outils de sensibilisation et d’orientations ciblées).

Le plan d’action prévoit quatre autres volets.

En dépit de progrès incontestables, le système européen de propriété intellectuelle demeure fragmenté. Aussi, la Commission propose-t-elle d’améliorer la protection de la propriété intellectuelle. L’objectif est de « faire en sorte que les innovateurs de l’UE aient accès à des outils de protection rapides, efficaces et abordables » :

  • déploiement rapide du système du brevet européen à effet unitaire (le lancement de ce système est subordonné à la ratification, par l’Allemagne, de l’accord relatif à une juridiction unifiée du brevet) ;
  • révision de la législation de l’UE sur la protection des dessins et modèles (« améliorer l’accessibilité et le caractère abordable de la protection des dessins ou modèles dans l’UE », « faire en sorte que le régime de protection des dessins ou modèles soutienne davantage la transition vers l’économie verte et numérique ») ;
  • renforcement de la protection des indications géographiques agricoles (les IG agricoles représentent 15,5% du total des exportations agroalimentaires de l’UE) ;
  • évaluation de la faisabilité d’un système européen de protection des indications géographiques non agricoles (les IG non agricoles « constituent souvent un élément important de l’identité locale, favorisent le tourisme, nécessitent des compétences uniques et contribuent à la création d’emplois ») ;
  • évaluation de la législation européenne relative aux obtentions végétales (le régime de protection communautaire des obtentions végétales contribue à la « réalisation des objectifs du pacte vert pour l’Europe et des objectifs de développement durable des Nations unies ») ;
  • amélioration du régime des certificats complémentaires de protection (les CCP offrent une période supplémentaire de protection de la propriété intellectuelle pour les médicaments et produits phytopharmaceutiques brevetés) ;
  • examen de l’incidence des nouvelles technologies sur le système de propriété intellectuelle (l’intelligence artificielle et la chaîne de blocs « peuvent contribuer à faciliter la protection de la propriété intellectuelle […] et permettre une distribution plus souple des droits de licence et une lutte plus efficace contre la contrefaçon et le piratage ») ;
  • soutien à la transposition et à la mise en œuvre des deux directives de 2019 relatives au droit d’auteur (la Commission publiera prochainement des orientations en vue d’aider les États membres à mettre en œuvre « l’article 17 de la directive sur le droit d’auteur, qui établit un régime juridique spécifique pour l’utilisation de contenus protégés par le droit d’auteur par les plateformes de partage de contenus téléversés par leurs utilisateurs ») ;
  • suivi de l’application de la directive sur les biotechnologies (la Commission considère que les « brevets dans le domaine des biotechnologies offrent des incitations essentielles, mais ils devraient être délivrés dans des circonstances justifiées »).

Regrettant que seules 9% des petites et moyennes entreprises de l’UE ont enregistré des droits de propriété intellectuelle, la Commission propose de « stimuler l’adoption de la propriété intellectuelle par les PME »: mise en place, à compter du premier trimestre 2021, d’un « dispositif de chèques PI en faveur des PME permettant de financer l’enregistrement des droits de propriété intellectuelle et la fourniture de conseils stratégiques en matière de propriété intellectuelle » (20 millions d’euros) ; amélioration de l’accès aux informations et aux conseils en matière de propriété intellectuelle (création du Centre d’information européen sur la propriété intellectuelle et déploiement des services d’assistance en matière de propriété intellectuelle pour les PME dans le cadre du programme Horizon Europe et d’autres programmes de l’UE) ; facilitation de l’utilisation de la propriété intellectuelle comme levier d’accès au financement (amélioration de la prise en considération des actifs intellectuels des PME par la communauté financière) ; encouragement de la « valorisation de la propriété intellectuelle dans le cadre de l’évaluation des entreprises par les investisseurs » ; amélioration des « conditions permettant aux entreprises de protéger et d’utiliser la propriété intellectuelle dans les marchés publics ; etc.

La crise liée à la COVID-19 a fait apparaître « la dépendance de l’UE à l’égard des innovations et technologies critiques ». Partant, la Commission propose de faciliter le partage de la propriété intellectuelle :

  • incitation à la mise en commun rapide de la propriété intellectuelle en temps de crise (instauration de procédures accélérées pour la délivrance de licences obligatoires dans les situations d’urgence [1] ; renforcement de la coordination dans le domaine des licences obligatoires) ;
  • renforcement de la performance de l’« infrastructure du droit d’auteur » (amélioration de la « disponibilité d’informations faisant autorité et actualisées sur les titulaires de droits, les conditions et les possibilités d’octroi de licences ») ;
  • réforme du cadre régissant les brevets essentiels liés à une norme (mise en œuvre de « règles stables, efficientes et équitables » en matière d’octroi de licences, etc.) [2] ;
  • promotion du partage des données protégées par des droits de propriété intellectuelle (précision du champ d’application de la directive sur les secrets d’affaires et révision de la directive sur les bases de données).

Constatant que les entreprises européennes « continuent de faire face à de sérieux défis lorsqu’elles opèrent dans des pays non membres de l’UE » (respect insuffisant des règles relatives à la propriété intellectuelle, transfert forcé de technologies, etc.), la Commission souhaite « promouvoir des conditions de concurrence équitables au niveau mondial » :

  • renforcement de la position de l’UE en tant qu’initiatrice de normes sur la propriété intellectuelle à l’échelle mondiale (inclusion, dans les accords de libre-échange, de « chapitres ambitieux sur la propriété intellectuelle comprenant des normes élevées de protection » ; mise en œuvre intégrale des dispositions relatives à la propriété intellectuelle dans les accords de libre-échange existants ; promotion de réformes dans le cadre des dialogues sur la propriété intellectuelle avec les principaux partenaires commerciaux et d’autres pays prioritaires ; renforcement des programmes de coopération technique « IP Key ») ;
  • intensification des efforts pour protéger les entreprises de l’UE contre les pratiques déloyales auxquelles se livrent des acteurs de pays tiers (utilisation de la liste de surveillance de la contrefaçon et du piratage [3] ; utilisation du rapport sur les pays tiers [4] ; activation, par les États membres, de leurs mécanismes de filtrage des investissements étrangers ; mise en place de nouvelles conditions-cadres pour la coopération internationale en matière de recherche avec des entités de pays non membres de l’UE ; utilisation des mesures restrictives disponibles pour lutter contre le cyber-espionnage visant à dérober des actifs européens de pointe en matière de propriété intellectuelle ; amélioration de la coordination européenne en vue de « définir et défendre des normes mondiales de protection de la propriété intellectuelle et les meilleures solutions possibles aux nouveaux défis » au sein des instances internationales ; renforcement de l’assistance technique en vue d’« aider les pays en développement à tirer le meilleur parti de la propriété intellectuelle » ; etc.).

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[1] La délivrance de licences obligatoires correspond à la « situation dans laquelle les pouvoirs publics autorisent une partie à utiliser une invention brevetée sans le consentement du titulaire du brevet ».
[2] Les brevets essentiels liés à des normes sont des « brevets portant sur des technologies intégrées dans des normes ». Ils « jouent un rôle déterminant dans le développement de la 5G et de l’Internet des objets ».
[3] La liste de surveillance de la contrefaçon et du piratage répertorie les marchés et les fournisseurs de services qui se livrent à la contrefaçon ou au piratage, facilitent ces activités ou en bénéficient.
[4] Le rapport sur les pays tiers recense les pays tiers dans lesquels la situation en matière de protection et de respect des droits de propriété intellectuelle suscite les préoccupations les plus grandes.

Les Européens sont moins nombreux à acheter des contrefaçons

C’est une nouvelle encourageante : « les Européens sont moins nombreux à acheter des contrefaçons ou à accéder à du matériel piraté ».

Publiée le 24 novembre dernier par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), la troisième édition de l’étude sur la perception des droits de propriété intellectuelle par les citoyens de l’Union européenne fait apparaître une légère baisse de la proportion d’Européens admettant avoir intentionnellement acheté des produits de contrefaçon au cours des douze derniers mois. Entre 2017 et 2020, cette proportion est passée de 7% à 5%. Pour ce qui concerne la France, elle est passée de 6% à 3%.

Les contrefaçons sont désormais perçues de manière plus négative. Pas moins de 83% des Européens estiment que l’achat de contrefaçons « ruine les entreprises et défavorise l’emploi ». Ils sont en outre plus nombreux à percevoir l’achat de contrefaçons comme portant préjudice à leur image (17% en 2020 contre 12% en 2017). Seuls 15% d’entre eux sont tout à fait ou plutôt d’accord avec l’affirmation selon laquelle il est acceptable d’acheter des produits de luxe de contrefaçon.

Cette tendance résulte d’une « meilleure compréhension des droits de propriété intellectuelle » (80%). Elle a probablement été « renforcée par les réactions négatives du public observées pendant la crise de la COVID-19 à l’encontre des faux médicaments et des équipements de protection individuelle contrefaisants ». Les Européens sont presque unanimes (98%) à considérer « qu’il est important que les inventeurs, les créateurs et les artistes puissent protéger leurs droits et être rémunérés pour leur travail ». Ils sont cependant « encore très nombreux à penser que la propriété intellectuelle profite surtout aux élites, comme les artistes célèbres ou les grandes entreprises ».

Il est par ailleurs à noter que la disponibilité de produits authentiques abordables « demeure le principal motif pour cesser d’acheter des contrefaçons ». Ce motif a cependant « perdu de son importance en termes absolus par rapport à 2017 ».

Pour ce qui concerne le piratage, seuls 8% des Européens admettent avoir eu accès intentionnellement à des contenus en ligne au moyen de sources illégales au cours des douze derniers mois, contre 10% en 2017. En France, cette proportion est passée de 15% en 2017 à 9% en 2020.

Les Européens ont désormais « une nette préférence pour le contenu en ligne légal, à condition que le prix soit raisonnable » (89%). Ils sont en outre plus nombreux à considérer que la qualité et la diversité du contenu offert par les services légaux sont meilleures que ce que l’on peut trouver par le biais de sources illégales. Au cours des douze derniers mois, 42% d’entre eux ont payé pour accéder à, télécharger ou diffuser en continu du contenu protégé par le droit d’auteur à partir d’un service légal (+17% par rapport à 2017). Pour ce qui concerne la France, 41% des personnes interrogées ont déclaré avoir payé du contenu en ligne provenant d’un service légal au cours de l’année écoulée (+15% par rapport à 2017).

Sans surprise, les jeunes âgés de 15 à 24 ans constituent toujours le premier groupe à acheter des contrefaçons et à télécharger des contenus illégaux. 10% d’entre eux ont admis avoir acheté sciemment des produits de contrefaçon au cours des douze derniers mois, tandis que 23% ont déclaré avoir volontairement consulté, téléchargé ou diffusé des contenus provenant de sources illégales. Le risque de sanction est un facteur important dans la décision des jeunes de cesser d’acheter des contrefaçons (46%).

Enfin, l’étude révèle « une certaine porosité entre le groupe de consommateurs qui accèdent à des sources illégales de contenu numérique et le groupe de consommateurs qui achètent des produits de contrefaçon ». Près d’un tiers des Européens ayant volontairement accédé à des contenus piratés en ligne ont également acheté des produits de contrefaçon.

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Lutte contre la contrefaçon : les initiatives de la France

En novembre 2020, les Annales des mines ont consacré l’une de leurs séries trimestrielles – Réalités industrielles – à la propriété industrielle.

Ce numéro a été coordonné par le directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle, Pascal FAURE. Vous pouvez le lire en cliquant ici [http://www.annales.org/].

Vous trouverez, ci-dessous, l’article que j’ai commis avec le président de l’Union des fabricants, Christian PEUGEOT.

L’article dresse un constat alarmant de la situation chiffrée de la contrefaçon dans le monde, plus particulièrement en Europe et en France. Face à ce fléau aux tendances tentaculaires, quels sont les dispositifs mis en place tant par les pouvoirs publics que par les entreprises ? L’article montre combien la qualité de la coopération entre les principaux acteurs publics et privés de la scène internationale constitue un atout décisif dans la lutte anti-contrefaçon. En France, le Comité national anti-contrefaçon (CNAC) et l’Union des fabricants (UNIFAB) s’épaulent mutuellement tant au travers de leurs actions concrètes de sensibilisation que de leur action pour faire évoluer les législations et agir à l’international.

État des lieux : la contrefaçon est un fléau pour l’Europe, particulièrement pour la France

Aucun secteur de l’industrie n’est épargné par les atteintes aux droits de propriété intellectuelle (1). En effet, la contrefaçon touche tous les types de produits, et particulièrement les cosmétiques, les vêtements, les jouets, le vin, mais aussi les pesticides ou les produits pharmaceutiques. La pandémie de COVID-19 illustre les risques auxquels le consommateur de produits contrefaisants expose sa santé et sa sécurité, derrière l’apparence de la « bonne affaire ». Lors de l’opération Pangea (2) XIII, coordonnée par INTERPOL et menée début 2020 dans quatre-vingt-dix pays, pas moins de deux mille bannières publicitaires en lien avec la pandémie ont été recensées sur Internet, proposant des masques contrefaisants, de faux sprays, des « packs anti-coronavirus » ainsi que des médicaments censés soigner les personnes atteintes du COVID-19. Par rapport à la précédente édition de l’opération Pangea, menée en 2018, les saisies d’antiviraux non autorisés ont augmenté de 18%. Les saisies de chloroquine non autorisée ont, quant à elles, augmenté de 100%.

Au-delà des risques pour le consommateur, les produits contrefaisants ont un impact non négligeable sur l’économie en termes d’emplois et de recettes publiques. La production de l’ensemble des produits contrefaisants importés dans l’Union européenne (UE) représentait l’équivalent de quatre cent mille postes sur l’année 2019. Les pays de l’Union européenne perdent chaque année 15 milliards d’euros de recettes fiscales du fait de l’importation de produits contrefaisants. Rien n’est respecté dans une contrefaçon : ni les normes obligatoires du produit, ni le reversement de la TVA, ni le paiement des droits de douane, du fait que les contrefacteurs déclarent rarement leurs activités et sont difficilement identifiables.

Le commerce de produits de contrefaçon, souvent aux mains de grands réseaux criminels, peut alimenter des groupes terroristes. Le rapport édité et publié par l’UNIFAB (3), qui a été remis au gouvernement sous l’intitulé « Contrefaçon et terrorisme (4) », a mis en lumière le fait que cette activité illicite est la deuxième source mondiale de revenus criminels.

Ce fléau est en effet mondial : selon un rapport de l’OCDE/EUIPO de mars 2019 (5), les principales victimes en ont été les États-Unis, dont certaines marques ou brevets ont été utilisés pour 24% des produits de contrefaçon saisis, suivis de la France (17%), de l’Italie (15%), de la Suisse (11%) et de l’Allemagne (9%). La France, un des tout premiers acteurs dans le secteur du luxe, où abondent les copies, est le pays le plus concerné en Europe, et le plus touché au monde derrière les États-Unis.

Si la majorité des produits contrefaisants saisis lors de contrôles douaniers proviennent d’Asie, les entreprises de Singapour, Hong Kong, de Chine ou du Brésil deviennent elles-mêmes des cibles, et ce de manière croissante. Les Émirats Arabes Unis, la Turquie, Singapour, la Thaïlande et l’Inde constituent les autres principaux lieux de provenance.

Ces constats sont d’autant plus préoccupants qu’il y a eu une augmentation significative du volume des contrefaçons entre 2013 et 2016 (461 milliards de dollars, soit 2,5% du commerce mondial en 2013 – 509 milliards de dollars, soit 3,3% du commerce mondial en 2016). Dans l’Union européenne, le commerce de marchandises a frôlé, en 2016, 7% des importations en provenance de pays non membres de l’UE contre 5% en 2013. Fait révélateur, durant cette période, le commerce mondial a ralenti. Le marché de la contrefaçon devient tentaculaire.

Le Comité national anti-contrefaçon français et l’Union des fabricants

Ces chiffres, ainsi qu’un récent rapport de la Cour des comptes (6), montrent que le dispositif français de lutte contre les contrefaçons nécessite une stratégie globale et la mobilisation de l’ensemble des acteurs.

En France, la lutte anti-contrefaçon est organisée au niveau public par le Comité national anti-contrefaçon (CNAC). Créé en 1995, il réunit des fédérations industrielles, des associations professionnelles, des entreprises et les administrations concernées par la lutte anti-contrefaçon. Richard Yung, sénateur (LREM) des Français de l’étranger, en est le président. L’Institut national de la propriété industrielle (INPI) en assure le secrétariat général (7). Ce partenariat public-privé vise à renforcer l’échange d’informations et de bonnes pratiques, à coordonner des actions concrètes et à formuler de nouvelles propositions. Le CNAC coordonne des travaux qui se déclinent en quatre grands thèmes : la sensibilisation, la législation, la coopération internationale et la lutte contre la cyber-contrefaçon.

Étant donné que la France est l’un des pays où les atteintes aux droits de propriété intellectuelle sont les plus nombreuses, il serait sans doute opportun de mettre en place, auprès du Premier ministre, une structure légère qui rassemblerait les données sur la lutte anti-contrefaçon et établirait un plan d’action.

L’Union des fabricants (UNIFAB), association nationale de promotion et de défense du droit de la propriété intellectuelle, coordonne, quant à elle, l’aspect privé de cette lutte. Créée en 1872 et placée sous la tutelle des ministères chargés de l’Intérieur et de l’Industrie, elle est la doyenne des associations à travers le monde. Elle compte plus de deux cents entreprises et fédérations professionnelles issues de tous les secteurs d’activité, de toutes les tailles et de toutes les nationalités. Elle s’organise autour de quatre grandes missions : l’accompagnement juridique de ses membres ; les échanges avec les plus grandes instances nationales, européennes et internationales ; la formation à la reconnaissance des vrais et faux produits des agents opérationnels de la Douane, de la Gendarmerie, de la Police, ainsi que des magistrats ; et, enfin, la sensibilisation du grand public au travers du musée de la contrefaçon qu’elle anime depuis plus de soixante-dix ans et par la création et la mise en place de campagnes de communication destinées à informer la population des effets et conséquences de la contrefaçon sur la santé, la sécurité, l’économie et l’environnement. Elle est également à l’origine de nombreux événements en France qui associent l’INPI et le CNAC : il s’agit notamment du Forum européen de la propriété intellectuelle et de l’édition française de la Journée mondiale anti-contrefaçon.

Sensibiliser

Une étude menée par l’IFOP pour l’UNIFAB (8) a révélé que 37% des consommateurs ont acheté sur Internet un produit contrefaisant, alors qu’ils pensaient acheter un produit authentique. Le CNAC et l’UNIFAB s’assurent en permanence que des messages de sensibilisation soient envoyés régulièrement aux consommateurs et aux décideurs politiques, et que les entreprises soient sensibilisées aux enjeux de la propriété intellectuelle.

Les consommateurs ne doivent pas être pénalisés, mais au contraire éduqués, informés, protégés et il faut leur donner toutes les informations pour leur permettre de faire le bon choix. À cet égard, ces campagnes de sensibilisation menées chaque année par l’UNIFAB, en partenariat avec l’INPI, le CNAC, la Douane et la Gendarmerie, sont de bons exemples. Chaque été, une vaste campagne de sensibilisation des estivants aux conséquences de l’achat de contrefaçons est organisée. Les équipes de l’UNIFAB parcourent les plages et les marchés du Sud de la France afin de prévenir et conseiller les consommateurs pour qu’ils évitent les pièges des contrefacteurs. Cette opération de sensibilisation permet de donner au grand public les outils pour mieux consommer.

Pour l’appropriation de la culture « propriété industrielle » par les entreprises, on peut évoquer les actions de l’INPI. L’INPI sensibilise les entreprises à l’importance pour elles d’une stratégie propriété intellectuelle qui s’intègre dans leur stratégie globale, en les informant sur les démarches à réaliser en matière de propriété intellectuelle, en identifiant, en fonction de leurs projets d’innovations, les solutions de protection les plus adaptées, et en dressant une revue de leurs pratiques ayant un impact sur leur propriété intellectuelle.

Enfin, les membres du CNAC et de l’UNIFAB (collectivement ou individuellement) utilisent toutes les occasions – ou les provoquent – pour cosigner des « position papers », échanger avec les parlementaires et les responsables politiques pour leur rappeler l’importance de cette problématique.

Se doter de l’arsenal législatif le plus complet possible

En 2014, la loi dite « loi Yung (9) » est venue renforcer l’arsenal juridique existant en matière de lutte anti-contrefaçon. Les principales dispositions de celle-ci sont le renforcement des dédommagements civils accordés aux victimes de contrefaçons, l’amélioration des conditions de démantèlement des réseaux de contrefaçon, la facilitation de l’établissement de la preuve de la contrefaçon et, enfin, le renforcement de la capacité d’intervention des douanes.

Les attentats de 2015, l’état d’urgence décrété et les liens avérés entre la contrefaçon et d’autres formes de criminalité organisée ont conduit à l’adoption en France, en juin 2016, d’une loi pour renforcer la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement (10), comme le démontre le rapport de l’UNIFAB évoqué plus tôt. Cette dernière a accru les sanctions pénales des délits aggravés de contrefaçon.

Plus récemment, certaines dispositions de la loi relative au Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE (11)) vont permettre aux titulaires de droits de mieux se défendre contre les contrefacteurs, notamment grâce à la modification du point de départ du délai de prescription des actions en contrefaçon de titres de propriété industrielle (12).

Coopérer au-delà de nos frontières

La guerre contre les contrefacteurs est une véritable course de vitesse. Son efficacité dépend pour beaucoup de la cohérence de la stratégie, de l’organisation et des moyens mobilisés. Les criminels recourent à des stratagèmes de contournement toujours plus évolués. Ils élaborent des montages complexes pour déguiser leurs activités : ils créent des entreprises fictives et des sociétés écrans, exploitent les faiblesses des contrôles aux frontières et des cadres réglementaires, et utilisent de faux documents. En un sens, ce sont aussi des innovateurs ! Si leur trafic ne connaît pas de frontières, la riposte doit en faire de même.

La qualité de la coopération entre les principaux acteurs publics et privés de la scène internationale constitue un atout décisif dans la lutte anti-contrefaçon. De tels partenariats peuvent et doivent prendre de multiples formes, notamment une réflexion commune sur certaines problématiques et la création d’un réseau des comités anti-contrefaçon. Pour ce faire, le CNAC peut compter sur la coopération du réseau des conseillers régionaux INPI répartis dans dix pays du monde, localisés au sein des services économiques régionaux des ambassades et au cœur de la Team France Export ; leur action couvre une centaine de pays (13). Le réseau des experts internationaux de l’UNIFAB, implanté dans près de trente pays, permet également un rayonnement et la dispense de conseils partout dans le monde.

En 2019, les membres du groupe de travail « Coopération internationale » du CNAC ont travaillé sur la mise en place d’une cartographie mondiale des problématiques que rencontrent les entreprises françaises en matière de contrefaçon.

Ce premier travail de définition des priorités va permettre de sélectionner chaque année des thèmes à traiter. Dans un premier temps, ses membres vont se concentrer sur quatre thématiques : l’Afrique, les look-alikes (reproduction ou imitation des aspects visuels du produit d’origine afin de communiquer une impression d’ensemble identique ou similaire), les questions de stockage/destruction/ recyclage et le problème des nouvelles routes de la soie.

La France a initié en 2018 la mise en place d’un réseau des comités anti-contrefaçon. Actuellement, ce réseau compte parmi ses membres : l’Italie, la Côte d’Ivoire, le Maroc et les Émirats Arabes Unis. En 2019, le Brand Protection Group libanais a entamé un travail visant à la création d’un comité anti-contrefaçon ou comité propriété intellectuelle au Liban, dans le cadre d’un dialogue avec le gouvernement. Les membres du CNAC soutiennent cette démarche en accompagnant son partenaire libanais dans sa structuration.

C’est dans cette droite ligne que s’inscrit également la création, initiée par l’UNIFAB et ses associations sœurs, d’un Groupement international anti-contrefaçon (Global Anti-Counterfeiting Group – GACG), qui recense toutes les associations nationales de lutte anti-contrefaçon qui coexistent dans tous les pays du monde. À cet effet, cette association d’associations permet d’entamer des discussions productives et positives afin de faire évoluer le droit de la propriété intellectuelle à l’international.

Trouver des solutions spécifiques au difficile problème de la cyber-contrefaçon

Internet est devenu le canal de distribution par excellence des marchandises de contrefaçon. Certains sites de ventes en ligne disparaissent aussi vite qu’ils apparaissent et sont donc très difficiles à localiser. Les produits contrefaisants sont de plus en plus souvent acheminés en petites quantités par voie postale ou fret express. 30 % des saisies de contrefaçon par les douanes françaises concernent des petits colis.

En 2000, nul ne pouvait soupçonner le rôle que seraient appelées à jouer notamment les plateformes et les positions dominantes qu’elles pourraient acquérir. De nombreux sites de e-commerce permettent à des entreprises tierces de vendre les produits proposés sur des plateformes dénommées marketplaces. Constituant un levier de développement important pour les petites et moyennes entreprises, ces marketplaces sont aujourd’hui considérées comme un outil essentiel dans la vie économique. Mais la législation actuelle est obsolète dès lors que la directive e-commerce (14) n’a pas été révisée depuis 2000 et qu’elle exempte les prestataires de services numériques de toute responsabilité quant aux contenus qu’ils diffusent. Ces faits conduisent l’UNIFAB à militer pour un réexamen de cette directive pour la mettre à jour et à entretenir, depuis plusieurs années, des liens étroits avec ces acteurs digitaux afin que le respect de l’authentique soit effectif sur ces espaces de vente comme il le serait dans un point de vente physique. Afin de travailler de concert avec les industriels, les pouvoirs publics et les décideurs politiques, un groupe de travail dédié à ce sujet a été créé au sein de l’UNIFAB.

Pour lutter contre la contrefaçon et assurer la protection des consommateurs, le gouvernement français a mis en place, entre 2009 et 2012, plusieurs accords volontaires de coopération, signés par différents acteurs économiques. Il a notamment créé la Charte de lutte contre la contrefaçon sur Internet entre titulaires de droits de propriété industrielle et plateformes de commerce électronique. Au niveau européen, le premier protocole d’accord sur la vente de contrefaçons sur Internet a été conclu en mai 2011. Un ensemble d’indicateurs pour évaluer l’efficacité du protocole a ainsi été ajouté au texte, et une version révisée de ce protocole d’accord a été signée en juin 2016 (15). La Commission européenne publiera prochainement une évaluation.

Outre la création d’un cadre juridique dans lequel la responsabilité serait partagée par tous les acteurs, une autre bonne pratique dont les législateurs devraient s’assurer est la suspension des noms de domaine portant atteinte à des droits de propriété intellectuelle. Ces noms de domaine constituent un énorme problème : en décembre 2019, Europol a annoncé avoir saisi plus de trente mille noms de domaine utilisés pour offrir des services et produits contrefaisants. L’opération s’est appuyée sur les efforts conjoints des services de police de plus de dix-huit pays, dont la France, et a permis l’arrestation de trois personnes suspectées d’avoir mis en œuvre ces différents sites (16). Une législation comme celle des États-Unis – qui permet d’obtenir, en une seule action, la saisie ou la suspension de plusieurs noms de domaine – changerait la donne pour les entreprises françaises et européennes. Une évolution législative, comme le prônent l’UNIFAB et le CNAC dans leur mission commune de discussion avec les instances gouvernementales, serait une réelle avancée.

Enfin, depuis quelques années, les nouvelles technologies apportent un soutien réel aux entreprises qui luttent contre la contrefaçon. Dans l’univers des vins et spiritueux, les produits sont de plus en plus souvent connectés par le biais de puces RFID, de QR code ou de la technologie NFC. Le principe est de marquer le produit, qui pourra ensuite être « lu » et révéler ainsi les informations qu’il renferme : ses caractéristiques, mais aussi son parcours ‒ de sa fabrication jusqu’à sa commercialisation ‒, garantissant ainsi son authenticité. Le code peut être scanné depuis un terminal spécifique (détenu par un expert, interne ou non à la marque) ou, plus simplement, depuis un smartphone par le consommateur. Autre exemple, celui des traceurs chimiques : cette technique consiste à intégrer, dès le processus de fabrication du produit ou de son emballage, un traceur chimique, directement mélangé à la matière du produit ou du packaging. Ceux-ci seront alors marqués et identifiables. Le traceur peut être, ou non, visible à l’œil nu et détectable au moyen d’un matériel spécifique (lampes, applis smartphone…). Ces traceurs peuvent être incorporés aux encres, vernis, cartons, plastiques… Ils apportent la preuve technique, mais aussi juridique qu’un produit est vrai, et qu’a contrario, un autre ne l’est pas. Ce système est très utilisé par l’industrie pharmaceutique, le secteur des vins et spiritueux, de l’alimentaire, des jouets ou encore des jetons de casino. Afin de proposer ce florilège de solutions existantes sur le marché, l’UNIFAB a créé récemment le LAB qui regroupe tous les acteurs technologiques qui viennent compléter le paysage de la lutte contre la prolifération des faux produits !

On l’aura compris, ce n’est qu’en agissant tous ensemble que nous pouvons aider à renforcer la confiance des consommateurs, à défendre les intérêts des entreprises légitimes et à stimuler la croissance dans le monde entier.

Richard YUNG, sénateur représentant les Français établis hors de France et président du CNAC, et Christian PEUGEOT, président de l’Unifab

(1) EUIPO (2020), “Status report on IP infrigment”, juin.
(2) L’opération Pangea, coordonnée par INTERPOL, est une initiative internationale qui vise à faire cesser la vente en ligne de produits de santé contrefaisants et illicites. Elle a également pour objectif tout aussi important de sensibiliser aux risques liés à l’achat de médicaments sur des sites Web non réglementés. Depuis son lancement, en 2008, l’opération a permis de retirer de la circulation plus de cent cinq millions d’unités (comprimés, ampoules, sachets, flacons, etc.) et de procéder à plus de trois mille arrestations.
(3) L’UNIFAB, pour Union des fabricants, est une association nationale de promotion et de défense du droit de la propriété intellectuelle : elle coordonne l’action des acteurs privés dans la lutte anti-contrefaçon.
(4) UNIFAB (2016), « Contrefaçon et terrorisme ».
(5) OCDE/EUIPO (2019), « Tendance du commerce des produits contrefaisants et piratés », mars.
(6) Cour des comptes (2019), « La lutte contre les contrefaçons », mars. Rapport pour lequel le CNAC et l’UNIFAB ont été auditionnés.
(7) Bilan 2018 des actions en matière de lutte anti-contrefaçon menées par les partenaires publics et privés du CNAC.
(8) IFOP (2018), « Les Français et les dangers de la contrefaçon », sondage réalisé pour l’Union des fabricants.
(9) Loi n°2014-315 du 11 mars 2014 renforçant la lutte contre la contrefaçon.
(10) Loi n°2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale.
(11) Loi n°2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.
(12) Dans le cadre de la loi du 11 mars 2014, le délai commençait à courir « à compter des faits qui en sont la cause » en matière de dessins et modèles (ancien art. L. 521-3 du CPI) et en matière de brevets (ancien art. L. 615-8 du CPI). En matière de marque, à défaut de précision, le délai de prescription courait « à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer », conformément aux dispositions de droit commun (art. 2224 du Code civil). Les nouvelles dispositions, introduites par la loi PACTE, prévoient désormais que les actions civiles en contrefaçon de brevet (art. L. 615-8 du CPI), de dessins et modèles (art. L. 521-3 du CPI) et de marques (art. L. 716-5 al. 3 du CPI) se prescrivent par cinq ans « à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer ».
(13) https://www.inpi.fr/fr/nos-implantations
(14) Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique »).
(15) Memorandum of Understanding on the sale of counterfeit goods via the Internet, https://ec.europa.eu/growth/industry/policy/ intellectual-property/enforcement/memorandum-understandingsale-counterfeit-goods-internet_en
(16) Opération réalisée dans le cadre de la campagne ‟In Our Sites’’, lancée en 2014 par Europol et qui vise à lutter contre la contrefaçon au sens large et assainir la vente sur Internet.