Lutte anti-contrefaçon: la Cour des comptes appelle les pouvoirs publics à « engager des actions plus volontaristes »

Le 3 mars, la Cour des comptes a remis au comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) de l’Assemblée nationale une enquête sur la lutte contre les contrefaçons.

Réalisée de mars à octobre 2019 auprès de nombreuses administrations – françaises et étrangères – et d’organisations internationales, cette enquête porte sur les atteintes aux droits de propriété industrielle et ne traite pas des violations des droits d’auteur, qui font l’objet d’une politique spécifique. Elle s’inscrit dans le prolongement d’un référé publié en 2014, dont les recommandations n’ont pas – ou peu – été suivies d’effets.  

Ce document doit servir de base à un rapport d’évaluation de la lutte contre la contrefaçon, que les députés Christophe Blanchet (LREM) et Pierre-Yves Bournazel (UDI-Agir) devraient présenter en juin.

Partant du constat que l’amplification du commerce de contrefaçons est « facilitée par la libéralisation des échanges » et « emporte de nombreux risques » pour les entreprises, l’État et les consommateurs, les magistrats de la rue Cambon jugent nécessaire de :

  • renforcer les actions de lutte contre les contrefaçons aux plans international et européen ;
  • mobiliser et coordonner plus efficacement les administrations françaises ;
  • renforcer l’information des consommateurs et des entreprises ;
  • adapter le dispositif juridictionnel de protection des droits de la propriété intellectuelle.

À cette fin, ils formulent onze recommandations :

1) Agir au sein du G7 et du Conseil européen pour faire de la lutte contre la production et le commerce de contrefaçons un axe des négociations sur le commerce mondial et des accords commerciaux entre l’Union européenne et les pays tiers (SGAE, SG MEAE, DGT).

2) Agir dans le cadre du Conseil européen pour inscrire la lutte contre les contrefaçons au nombre des priorités de l’Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) et de l’Office européen de police (EUROPOL).

3) Œuvrer pour une meilleure harmonisation des dispositifs opérationnels de contrôles douaniers et réunir les conditions pour renforcer les procédures juridiques de protection des droits de propriété intellectuelle.

4) Agir dans le cadre de la révision de la directive commerce électronique, pour renforcer les obligations juridiques des plateformes numériques en matière de lutte contre les contrefaçons.

5) Établir d’ici fin 2020, sous l’autorité du Premier ministre, un plan d’action interministériel de lutte contre les contrefaçons et en confier la mise en œuvre au ministre chargé de l’économie.

6) Charger l’INPI de collecter l’ensemble des données utiles à la quantification de la contrefaçon et au recensement des actions des administrations, en vue de les transmettre à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et de contribuer au suivi du plan d’action interministériel.

7) Regrouper, sous l’égide de la DGDDI, des agents des différentes administrations concernées dans une unité chargée de centraliser et de partager le renseignement relatif à la contrefaçon.

8) Mieux informer les consommateurs des conséquences pour leur sécurité, l’économie et l’emploi, de l’achat de produits contrefaisants.

9) Expérimenter, en s’inspirant du dispositif canadien « Chargeback », un mécanisme permettant le remboursement aux consommateurs de leurs achats de contrefaçons sur Internet.

10) Poursuivre la spécialisation des juridictions et des magistrats dans le traitement des violations des droits de propriété intellectuelle.

11) Adapter la législation en :

  • mettant en place des amendes civiles en complément des dommages et intérêts ;
  • permettant la suspension groupée des noms de domaines portant atteinte à un même droit ;
  • examinant les conditions facilitant le recours à la peine complémentaire de confiscation des avoirs criminels pour les délits de contrefaçon simple.

Vous pouvez lire l’enquête en cliquant ici.