Brevetabilité du vivant: plusieurs organisations saluent l’avis de la Commission européenne

Le 3 novembre dernier, la Commission européenne a publié un avis sur certains articles de la directive du 6 juillet 1998 relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques.

Vous trouverez, ci-dessous, une dépêche de l’agence Europe qui présente les points de vue de plusieurs organisations.

Bruxelles, 07/11/2016 (Agence Europe) – Plusieurs organisations, dont la coalition ‘No Patents on Seeds’, la Coordination européenne Via Campesina et l’ESA (European Seed Association), ont salué la mise au point faite le 3 novembre par la Commission européenne au sujet des brevets sur les plantes et les animaux obtenus par des procédés naturels de sélection (EUROPE 11422).

En mars 2015, l’OEB (Office européen des brevets) a octroyé à Plant Bioscience deux brevets pour la découverte de caractères présents dans certains types de brocolis et de tomates. Le premier concerne l’augmentation, pour certains brocolis, de la concentration en glucosinolates, métabolites aux effets anticancerigènes ; le second confère à la tomate Lycopersicon esculentum une capacité naturelle à la déshydratation sans pour autant qu’elle ne souffre de quelque altération microbienne que ce soit.
Comme ces phénotypes découlent de l’expression de génomes végétaux, les deux brevets accordés à Plant Bioscience concernent donc, indirectement, les gènes qui en sont responsables.

Dans un avis du 3 novembre sur « certains articles de la directive 98/44/CE sur la protection juridique des inventions biotechnologiques », la Commission estime que les décisions récentes de l’OEB d’accorder de tels brevets (tomates et brocolis) sont contraires à « l’intention du législateur européen ».

Incertitudes juridiques. La Commission souligne aussi que, depuis l’adoption de la directive, des « progrès technologiques significatifs » ont bouleversé la manière de breveter les plantes et les animaux. Les nouvelles techniques, qui permettent désormais de breveter le gène natif des organismes vivants, n’ont pas pu être prises en compte par le législateur en 1998. C’est pourquoi la Commission appelle à engager « une réflexion plus approfondie » sur ces nouvelles « incertitudes juridiques ».

Via Campesina appelle les pays qui ne l’ont pas fait à respecter l’intention du législateur européen. L’OEB « sera alors contraint d’en prendre acte et d’interdire que la protection de quelque brevet que ce soit ne puisse s’étendre au gène natif des plantes et des animaux ».

L’ESA salue aussi la clarification faite par la Commission selon laquelle le législateur européen n’avait pas l’intention d’accorder la protection des brevets pour les produits (plantes) obtenus par des procédés essentiellement biologiques.

« Il s’agit d’un énorme succès pour les organisations de la société civile et les milliers de personnes qui se battent contre les brevets sur les plantes et les animaux », estime la coalition ‘No Patents on Seeds’. Elle rappelle toutefois que la déclaration publiée par la Commission européenne n’est pas juridiquement contraignante et que de nouvelles définitions seront nécessaires. « Il revient aux gouvernements européens de mettre l’OEB sous contrôle politique », commente Christoph Then, de ‘No Patents on Seeds’.

Le Parlement européen a déjà invité en décembre 2015 la Commission européenne à clarifier d’urgence le champ d’application et l’interprétation de la directive 98/44/CE sur les brevets, « afin d’établir une certitude juridique concernant l’interdiction de la brevetabilité de produits obtenus par des procédés essentiellement biologiques » (EUROPE 11456). (Lionel Changeur)