La saveur d’un produit alimentaire ne peut être protégée par le droit d’auteur

Bruxelles, 13/11/2018 (Agence Europe) – Ne pouvant être qualifiée d’« œuvre », la saveur d’un produit alimentaire ne peut pas bénéficier d’une protection par le droit d’auteur, a estimé la Cour de justice de l’UE dans un arrêt rendu mardi 13 novembre (affaire C-310/17).
Aux Pays-Bas, la société Levola, qui dispose depuis 2011 des droits de propriété intellectuelle du fromage à tartiner à la crème fraîche et aux fines herbes Heksenkaas, a saisi la justice néerlandaise pour interdire la commercialisation du Witte Wievenkaas, fromage à tartiner produit par la société Smilde, au motif que ce dernier porte atteinte à ses droits d’auteur sur la « saveur » du Heksenkaas au sens de la directive (2001/29).
Dans son arrêt, la Cour reprend à son compte le raisonnement de l’avocat général et donne tort à la société Levola (EUROPE 12070).
D’après le juge européen, pour être protégée par le droit d’auteur, la saveur d’un produit alimentaire doit être qualifiée d’« œuvre » au sens de la directive. Une telle qualification suppose que l’objet concerné soit une création intellectuelle originale et exige une « expression » pour rendre cette création identifiable avec suffisamment de précision et d’objectivité.
En effet, au sens de l’accord à l’OMC sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, auquel l’UE a adhéré (décision 94/800 du Conseil), et du traité de l’OMPI approuvé par l’UE (décision 2000/278 du Conseil), les expressions peuvent être protégées et non les idées, les procédures, les méthodes de fonctionnement ou les concepts mathématiques.
Dans ce contexte, la Cour constate qu’une identification précise et objective de la saveur d’un produit alimentaire est impossible. À la différence d’une œuvre littéraire ou cinématographique, l’identification de la saveur d’un produit alimentaire repose sur des sensations et des expériences gustatives qui sont subjectives et variables et n’est pas possible par des moyens techniques en l’état actuel du développement scientifique. (Mathieu Bion)