Contrefaçon de médicaments: la convention Médicrime bientôt ratifiée

Le 5 juin dernier, j’avais interrogé le Gouvernement sur la ratification par la France de la convention Médicrime.

Vous trouverez, ci-dessous, le texte de ma question écrite ainsi que la réponse du ministre des affaires étrangères et du développement international.

Question n° 11927 adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international (publiée le 05/06/2014)

M. Richard Yung attire l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique. Ouvert à la signature le 28 octobre 2011, ce texte – communément connu sous le nom de convention Médicrime – constitue le premier instrument international dans le domaine du droit pénal. Il prévoit que les États parties prennent les mesures nécessaires pour ériger en infractions pénales la fabrication, la fourniture, l’offre de fourniture et le trafic de contrefaçons. Il tend, par ailleurs, à améliorer la coopération et l’échange d’informations entre les autorités compétentes, tant au niveau national qu’international. Il comprend également des mesures de prévention et de protection des victimes. Déjà signée par vingt-six États, dont la France, la convention Médicrime offre un cadre juridique international pour combattre un phénomène qui prend une ampleur très inquiétante. En effet, selon le Conseil de l’Europe, les ventes mondiales de faux médicaments ont doublé entre 2005 et 2010. Elles représenteraient aujourd’hui plus de 57 milliards d’euros. Aucun pays n’est épargné et tous les médicaments sont concernés (Viagra ; anticancéreux ; traitements contre le paludisme ; anti-thrombotiques ; etc.). D’après l’agence de santé américaine, un médicament sur dix vendu dans le monde serait une contrefaçon. Pis, dans certains pays africains, la moitié des médicaments en circulation seraient des faux. En France, les médicaments de contrefaçon ont représenté 18 % des 7,6 millions d’articles saisis par la douane en 2013. En février 2014, les douaniers du Havre ont découvert 2,4 millions de faux médicaments en provenance de Chine, soit la plus importante saisie de contrefaçons de médicaments jamais réalisée par les services douaniers dans l’Union européenne. La croissance exponentielle du trafic de faux médicaments s’explique principalement par l’essor du commerce en ligne. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), un médicament sur deux vendu sur internet est faux. Il en résulte que les produits médicaux contrefaisants sont désormais les premières marchandises saisies aux frontières de l’Union européenne via le trafic postal. La contrefaçon de médicaments est une activité particulièrement lucrative. Elle serait dix à vingt-cinq fois plus rentable que le trafic de drogue. D’après l’Institut international de recherche anti-contrefaçon de médicaments (IRCAM), la contrefaçon d’un « blockbuster », c’est-à-dire un médicament rapportant plus d’un milliard de dollars pour un laboratoire, peut générer un bénéfice d’environ 500 000 dollars pour un investissement initial de 1 000 dollars. Au total, le trafic de faux médicaments génèrerait environ 250 milliards de dollars par an. Ces sommes colossales servent, en grande partie, à financer des organisations criminelles transnationales. L’économie mondiale s’en trouve de plus en plus fragilisée. Plus grave encore, la contrefaçon de médicaments met en danger la santé des consommateurs. Les faux médicaments sont, en effet, des produits qui, selon les cas, ne contiennent aucun principe actif, des principes actifs mal dosés ou des principes actifs totalement différents de ceux devant être utilisés. Selon l’OMS, ce fléau cause environ 100 000 morts par an en Afrique. Compte tenu de la gravité des menaces induites par la contrefaçon de médicaments, il importe que la convention Médicrime entre en vigueur dans les plus brefs délais. Pour ce faire, deux ratifications sont encore nécessaires. Aussi souhaite-t-il connaître l’état d’avancement du processus de ratification, par la France, de cette convention.

Réponse de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international (publiée le 26/06/2014, page 1522)

Le trafic de contrefaçon de médicaments est un phénomène transnational, qu’il convient d’appréhender à l’échelle internationale. Il était donc indispensable de se doter d’un texte contraignant et d’applicabilité géographique large, harmonisant les législations pénales. C’est pourquoi la France s’est, dès son origine, fortement engagée dans le projet de la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique, plus connue sous le nom de Convention Médicrime, en tant que premier instrument pénal international, pour une lutte efficace et concertée contre le phénomène. La France a été un des premiers pays à signer la Convention, le jour même de l’ouverture à la signature. Le processus de ratification, qui a été lancé sans tarder, a nécessité un travail de transposition complexe, au regard tant de la matière abordée que du nombre de partenaires institutionnels à associer à ces réflexions (ministère de la santé, ministère de l’agriculture, ministère des finances, ministère du redressement productif, agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – ANSM, agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – ANSES, ministère de l’intérieur, douanes). Les incriminations concernant la contrefaçon des produits médicaux et menaçant la santé publique sont dispersées dans plusieurs codes et ne s’appliquent parfois qu’à un type d’auteur ou de victime restreint. Une lecture croisée de l’ensemble de ces incriminations appréhendées par le droit français, comportement par comportement, produit par produit, a donc été nécessaire. Cet examen a permis de constater que la législation française répondait en grande partie aux exigences posées par la Convention en matière de droit pénal matériel, moyennant toutefois quelques lacunes. Ces dernières ont aujourd’hui été comblées. Une fois recueilli l’avis du Conseil d’État, un projet de loi d’autorisation de ratification sera inscrit à l’ordre du jour du conseil des ministres, pour un dépôt dès la rentrée devant les assemblées. La France continue, parallèlement, à œuvrer à l’universalisation de la Convention, qui est ouverte aux États non membres du Conseil de l’Europe, par une sensibilisation au problème de la contrefaçon des médicaments et par une promotion active de la Convention à l’étranger.

Lutte contre la contrefaçon: rencontre avec des associations de consommateurs

Le 25 juin, la directrice générale de l’Institut national de la consommation (INC), Mme Fabienne CHOL, et moi-même avons accueilli au Sénat les représentants de six associations de consommateurs agréées :

  • MM. Alain COUDIN et Claude AMSELLE, membres de l’Association pour l’information et la défense des consommateurs salariés-CGT (INDECOSA-CGT)
  • M. Gérard DEBENEIX, membre du pôle consommation à la direction nationale de la Confédération nationale du logement (CNL)
  • Mme Isabelle LABOUYSSE-LALEU, administratrice nationale chargée du département « consommation » de l’association Familles de France
  • M. Patrick MERCIER, président de l’Association de défense, d’éducation et d’information du consommateur (ADEIC)
  • M. Manuel MESSEY, secrétaire général adjoint du Conseil national des associations familiales laïques (CNAFAL)
  • M. Rémi THERME, chargé de mission à l’Union nationale des associations familiales (UNAF)

Étaient également présents: M. Jean-Marc LE PARCO, directeur général délégué de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), Mme Delphine SARFATI-SOBREIRA, directrice générale de l’Union des fabricants (Unifab), membre du groupe de travail « sensibilisation » du CNAC, M. Quang-Minh LEPESCHEUX, responsable propriété intellectuelle (Microsoft), président du groupe de travail « cyber-contrefaçon » du CNAC, et Mme Anne-Catherine MILLERON, coordinatrice du CNAC (INPI).

Cette rencontre a été l’occasion d’échanges riches sur la lutte anti-contrefaçon (sensibilisation des consommateurs ; nouveau dispositif législatif ; lutte contre la contrefaçon numérique ; etc.).

Plusieurs propositions concrètes ont émergé de la discussion.

Je me réjouis que le Comité national anti-contrefaçon (CNAC) et les six associations présentes au Sénat souhaitent avancer dans la même direction afin de mieux protéger les consommateurs, dont la sécurité et la santé sont gravement menacées par les produits contrefaisants, à commencer par les faux médicaments.

Dîner-débat sur la contrefaçon et les médicaments

Le Cercle de l’Europe a organisé le mardi 24 juin un dîner-débat sur le thème de la lutte contre la contrefaçon dans le domaine des médicaments.

Cette contrefaçon est en croissance rapide, utilisant essentiellement des sites Internet hors de France comme lieux de vente et le fret express comme moyen d’acheminement.

J’ai pu à cette occasion expliquer l’action du CNAC en matière de sensibilisation (notre campagne sur Internet doit commencer bientôt) et nos propositions en matière de lutte contre la contrefaçon sur Internet.

Contrefaçon et coopération à Londres

Cette semaine à l’initiative du gouvernement britannique (ils ont un secrétariat d’État à la propriété intellectuelle), de l’Office des marques d’Alicante (OHIM) et de la commission, s’est tenue une réunion d’un grand nombre d’acteurs de la lutte anti contrefaçon de nombreux pays européens et du monde.

Étaient là des entreprises, des transporteurs, les douanes, les sociétés de droit d’auteur, les offices de brevets, … J’ai pu exposer ce que nous faisons en France à la fois avec la loi du 14 mars et dans le cadre du CNAC : lutte contre la cybercontrefaçon, coopération internationale, campagne de sensibilisation. C’est une excellente idée de faire rencontrer ceux qui travaillent sur ces questions pour leur permettre de partager leurs expériences et de coopérer. À suivre…

La lutte contre la contrefaçon : un combat plus que jamais d’actualité

À l’occasion de la journée mondiale anti-contrefaçon, qui s’est tenue ce jeudi 5 juin, le sénateur Richard YUNG (Français établis hors de France), président du Comité national anti-contrefaçon (CNAC), a souhaité rappeler que l’urgence de la lutte contre la contrefaçon demeure plus que jamais d’actualité.

En effet, ce véritable « cancer » continue de ronger l’économie mondiale et de menacer gravement la santé et la sécurité des consommateurs, à commencer par les plus fragiles. Tous les secteurs d’activité sont désormais frappés par ce fléau transnational, qui prospère sur internet et alimente de plus en plus le crime organisé.

Pour l’enrayer plus efficacement, de nouveaux outils ont été créés par la loi du 11 mars 2014. Il appartient désormais aux acteurs de la lutte anti-contrefaçon de se les approprier.

M. YUNG considère que la lutte contre la contrefaçon est un combat de longue haleine. De nombreux défis doivent encore être relevés.

La priorité doit être donnée à la lutte contre la contrefaçon numérique car les ventes sur la toile de produits contrefaisants ont explosé au cours des dernières années. Souhaitant prendre une part active à ce vaste chantier, le CNAC a transmis au Gouvernement plusieurs propositions concrètes. Il propose notamment de se pencher sur le rôle des intermédiaires de paiement en ligne.

Une autre priorité concerne le renforcement de la coopération internationale. En effet, pour être réellement efficace, la bataille contre la contrefaçon doit être menée de concert avec nos partenaires étrangers. La coopération avec les pays du pourtour méditerranéen doit en particulier être renforcée.

Enfin, la lutte contre la contrefaçon nécessite un gros effort de pédagogie et de sensibilisation. À cette fin, le CNAC lancera une grande campagne de communication sur la toile au cours de la première quinzaine de juillet. M. YUNG recommande aux consommateurs de se montrer vigilants lors de leurs achats en magasin ou en ligne afin de déjouer les pièges de la contrefaçon.